Un peu d'histoire avant de rentrer dans le vif du sujet de la réfection de ces deux carburateurs d'une moto russe/soviétique/ukrainienne Dniepr (ou Dnepr), copie - presque conforme - de sa sœur Oural (ou Ural). A l'époque, nous sommes alors à la veille de le Seconde Guerre Mondiale, à l'été 1939 plus précisément, le grand timonier du IIIe Reich, Adolf Hitler, soucieux de préserver ses arrières pendant qu'il projette l'invasion de l'Europe, signe un traité avec l'Union Soviétique du camarade Staline. Ce traité connu sous le nom de Pacte germano-soviétique est en fait un traité de non agression qui garantit au Führer la tranquillité sur ses frontières à l'Est afin qu'il puisse déployer toutes ses troupes à l'Ouest. En contrepartie, de la technologie allemande aurait été transférée à Moscou, un paquetage dans lequel on retrouve le sidecar BMW R71 qui équipait alors les troupes de la Wermacht. De nombreuses autres versions de la genèse des sidecars soviétiques existent et les spécialistes de la question débattent encore de l'alpha et de l'oméga de cette naissance. Toujours est-il que la ressemblance esthétique et technologique est frappante, au point que bon nombre de sidecars produits par l'Union des Républiques Soviétiques Socialistes importés en Occident ont été équipés, moyennant quelques adaptations, de moteurs BMW série 6 ou 7, le célèbre flat twin de BMW ("Bayerische Motoren Werke" en allemand, en français "Manufacture bavaroise de moteurs"), réputé plus fiable que le moteur agricole soviétique.
Voici un side-car Dniepr modèle K-750 équipe d'un moteur BMW R75/7. La boîte de vitesse d'origine de la moto ukrainienne a été conservée, car elle est dotée d'une marche arrière, et adaptée au niveau de la cloche et du disque d'embrayage sur le moteur allemand.
Photo by MMK
Plus récemment les tribulations de l'écrivain et aventurier Sylvain Tesson à bord de sidecars Oural de facture plus récente ont remis au goût du jour cet attelage atypique.
Pour en revenir à la genèse, l'Oural fut d'abord produite à Irbit dans le centre de la Russie, puis une seconde usine fut créée en Ukraine, à Kiev pour produire des motos à priori identiques mais cependant différentes par bien des aspects. Ainsi naquit la marque Dniepr.
Pour s'y retrouver:
- les motos Oural (Ural) fabriquées à Irbit sont des IMZ, abréviation du russe "Irbit Motorcykli Zavod" (Usine de motocyclettes d'Irbit). A ne pas confondre avec les MZ qui, elles, sont d'Allemagne de l'Est (Motorradwerk Zschopau) ou les CZ qui sont tchèques (Česká Zbrojovka).
- les motos Dniepr (Dnepr) fabriquées à Kiev (Ukraine) sont des KMZ, abréviation du russe "Kiev Motorcykli Zavod" (Usine de motocyclettes de Kiev).
Produites en version solo ou attelées, la motorisation de ces machines allait de 650 à 750 cm3. Les sidecars furent produits en versions 2 roues motrices et roue du panier freinée ou pas.
Pour en revenir à notre tuto, nous allons reconditionner deux carburateurs d'une motocyclette Dniepr qui n'a pas démarré au moins depuis la chute du Mur de Berlin.
Les carburateurs montés sur les cylindres à plat droit et gauche sont identiques et donc interchangeables (ce n'est pas le cas sur les BMW).
Pour démonter les carburateurs, il faut retirer les tubulaires d'air reliées à au filtre à air, les tuyaux d'arrivée d'essence, dégager le couvercle du boisseau (deux vis à dévisser) et la commande des câbles d'accélérateur et, enfin, retirer l'ensemble boisseau/ressort du puit d'aiguille.. Enfin, il faut dévisser les deux écrous qui maintiennent le carburateur sur la pipe d'admission pour pouvoir l'enlever complètement.
Dans le cas présent, l'ensemble boisseau/ressort qui a été retiré du puits d'aiguille du carburateur reste relié au câble d'accélérateur et n'est pas démonté de la moto.
Voici le schéma du montage des deux carburateurs et du filtre à air, issu de la Parts List de l'époque.
Les deux carburateurs K63 sont démontés. Nous allons pouvoir commencer leur réfection.
Et voici l'éclaté du carburateur K63 issu de la Parts Liste de l'époque.
Nous commençons par démonter la cuve du carburateur
La cuve est ouverte. Le joint d'étanchéité de cuve a subi les outrages du temps.Il va falloir démonter les trois gicleurs, celui du starter (à gauche,) et le gicleur principal (au milieu) et le gicleur de ralenti (caché par le gicleur principal sur cette photo). Il faut aussi démonter le flotteur et son pointeau.
Le joint de cuve part en lambeaux, complètement sec.
Voici le dispositif à l'intérieur du carburateur :
- le flotteur en plastique monté sur son axe et son pointeau
- le gicleur d'essence principal (au centre) vissé sur son pulvérisateur à l'extrémité du puits d'aiguille du boisseau
- à côté, le gicleur de ralenti également vissé dans son puits
- le gicleur du starter (dans l'angle en haut) monté sur son puits
Il faut extraire l'axe du flotteur à l'aide d'une pince à bec
L'axe du flotteur est sorti sans difficulté
Voici le pointeau fixé sur le flotteur
Je dévisse le gicleur de ralenti
Le pas de vis est un peu corrodé, mais il vient sans difficulté. Attention à ne pas forcer pour ne pas abîmer le pas de vis et le filetage du corps de carburateur.
Maintenant il faut dévisser le gicleur principal. Choisissez un tournevis avec une empreinte adaptée et en bon état pour ne pas abîmer le laiton.
Le gicleur principal est sorti sans forcer.
Maintenant il faut dévisser le puits d'aiguille du boisseau. Toujours avec délicatesse et doigté
Sans forcer, en tournant doucement il sort. Attention à bien ménager le pas de vis. Les alliages soviétiques de plus de 50 ans sont fragiles.
Et on termine par le gicleur de starter de démarrage
On retrouve la même corrosion sur le pas de vis du gicleur.
Au tour de la vis de richesse maintenant. Prenez bien le soin de repérer le nombre de tour de serrage (ou d'ouverture) avant de démonter.
La aussi pas de difficulté notoire.
Et on termine par le plongeur du starter.
Qui résiste un petit peu mais finit par sortir.
Le carburateur a été mis en pièce et le kit de réfection est arrivé d'Ukraine. On va pouvoir remonter.
Auparavant, toutes les pièces du carburateur démonté ont trempé quelques jours dans un mélange essence/nettoyant frein et passés à la brosse et à la soufflette air comprimé. Idéalement, il faudrait plonger les carburateurs démontés dans un bac à ultrasons, mais celui-ci faisant défaut au moment de cette intervention, nous nous contenterons d'un nettoyage "classique", comme au temps de la Guerre froide.`
A SUIVRE